Interview Catherine Phan van #2
Catherine ayant déjà répondu à une interview « classique », elle va se prêter au jeu du portrait chinois. Merci à elle. Je préfère prévenir d’emblée, je vais faire de mon mieux, mais vraiment, c’est un jeu auquel je ne suis pas douée du tout ! 😅 Si tu étais un style ou un genre littéraire ? La fiction. Quasiment tous les types de fiction, parce que je les apprécie presque tous, aussi bien en lecture qu’en écriture, quels que soient le genre, le lectorat cible ou le format, du feel good au thriller en passant par la fantasy, la SF, la blanche, le contemporain, les classiques, la jeunesse, le young adult, les nouvelles, les romans, le théâtre… Si tu étais un art ? La musique. C’est comme l’écriture : même si je m’en éloigne parfois, je finis toujours par y revenir. Au grand désespoir de mon entourage, parce que je ne suis vraiment pas douée. (Si vous tenez à vos tympans, ne me mettez pas une clarinette dans les mains !) 😆 Si tu étais un livre ? Une prière pour Owen, de John Irving. Je l’ai lu il y a très longtemps, et je l’ai tellement aimé que je n’ose plus le relire, de peur d’être déçue. Je ne me souviens même plus vraiment de l’intrigue, juste que le roman m’avait époustouflée. Irving écrit ses personnages comme aucun autre auteur, j’ai été bouleversée par plusieurs de ses textes. Si tu étais une émotion ? La mélancolie. C’est sans doute celle qui domine le plus souvent quand je peux me poser au calme, seule. Si tu étais un animal ? Un hérisson. Solitaire, avec une mauvaise vue, au meilleur de ma forme quand arrive le soir, et pas très bien armée pour me défendre dans le monde dans lequel je vis. Si tu étais un végétal ? Le lierre. Sans talent particulier, si ce n’est celui de m’accrocher de mon mieux où je peux pour tenter de grimper. Si tu étais un sens ? Question difficile. Pas la vue, c’est sûr, parce que j’ai vraiment de très mauvais yeux et que je ne vois rien à plus de cinq centimètres sans mes lunettes, mais j’hésite entre l’ouïe et l’odorat. Je suis très sensible aux sons et aux odeurs. Disons l’ouïe. Merci Catherine. Nous allons maintenant te poser quelques questions concernant tes écrits découverts dans ce numéro : Tu as été sélectionnée pour ce 14e numéro avec ta nouvelle La Nuit des betteraves grimaçantes, peux-tu expliquer sa genèse ? J’ai écrit cette nouvelle à l’origine en réponse à un appel à textes dont le thème était « automne cosy ». Je voulais créer une ambiance à la fois douce et un peu mystérieuse, et qui mette en valeur la beauté de cette saison que j’aime beaucoup. J’ai choisi de la placer dans la vallée de la Nied, en Lorraine, parce que j’avais envie de contribuer à faire redécouvrir cette ancienne tradition de la Rommelbootzennaat (nuit des betteraves grimaçantes) : elle n’a rien à envier à Halloween, après tout ! Et puis il y a un chat roux, parce que le chat, c’est l’animal cosy par excellence, et la rousseur, c’est très automnal. 😊 Tu nous présentes ta nouvelle Échos graphiques, peux-tu nous raconter ce qui t’a inspirée ? Je lisais de vieux faits divers pour nourrir mon inspiration, sans chercher quelque chose de particulier, et je suis tombée sur un récit atroce, dont je ne donnerai pas les détails ici pour ne pas spoiler la nouvelle, mais qui a aussitôt suscité des flashs visuels dans mon esprit. Ça m’a donné l’idée de reprendre un élément crucial de ce fait divers sous forme de texte horrifique, et de jouer avec des échos visuels pour créer une histoire qui entremêle présent et passé. Pour finir, peux-tu me parler de ton actualité ? Une sortie récente, un projet sur lequel tu travailles ? Je n’ai rien de prévu ces temps-ci en autoédition, parce que je ne me sens pas les épaules assez solides pour tout gérer sur des textes longs. 😕 J’assume donc mon côté hybride (et des titres à faire se retourner Jane Austen dans sa tombe), avec un premier roman feel good (Cercueil et préjugés) sorti en maison d’édition au mois de juin, et une autre comédie romantique feel good (Breizh, son et sentiments) en cours d’écriture.
Interview Catherine Phan van
Catherine a accepté de répondre à nos questions. Merci à elle ! Tu as été sélectionnée pour ce treizième numéro avec ta nouvelle Sinistre volonté, peux-tu expliquer sa genèse ? Je suis de nature assez curieuse et je suis tombée un jour sur un billet du blog d’un neurologue, sur la thématique de l’absence d’unicité du soi. D’ailleurs, je vous mets le lien, l’article est très fun à lire… si on a un humour un peu noir ! Le sujet m’a suffisamment intéressée pour me pousser à effectuer quelques recherches complémentaires sur le phénomène qui y est décrit et la manière dont il peut se manifester. Et puis l’envie est née de tordre tout ça, et de m’inspirer aussi bien du personnage réel de William P. Van Wagenen que de ce que sont devenus ses patients, pour imaginer une fiction. J’ai décrit quelques expériences qui pourraient vraiment être reproduites dans la réalité, je me suis amusée à faire tirer des conclusions totalement erronées de ses observations par un scientifique de la fin du XIXe siècle pétri de préjugés, j’ai introduit un soupçon de fantastique – parce qu’il m’est difficile d’y résister –, ajouté un très mauvais jeu de mots sur les noms, mélangé le tout, secoué un peu… Et voilà ! Plus à l’aise dans un registre particulier ? De quoi aimes-tu parler dans tes histoires ? Il y a un an, j’aurais encore répondu que j’étais surtout à l’aise pour écrire des histoires contemporaines avec une pointe de fantastique, de préférence avec une fin bien glauque et qui parlent de thématiques hyper joyeuses telles que la solitude, le deuil, la rancœur… Parce que, allez savoir pourquoi, c’est souvent ce qui me vient le plus naturellement quand je veux attaquer une nouvelle. Sauf que courant 2023, sur un coup de tête, à l’occasion d’un concours, je me suis lancée dans l’écriture d’une comédie romantique un peu déjantée. Et je me suis tout bonnement éclatée : je confesse même avoir réussi à me faire rire toute seule sur plusieurs passages. Alors je crois que finalement, je n’ai pas vraiment de registre de prédilection. J’écris surtout en fonction de l’envie du moment, qui peut fluctuer dans le temps et aller du très sombre au presque loufoque. Quand et comment as-tu commencé à écrire ? Te rappelles-tu ta première histoire ? Quand j’étais enfant, aussi loin que remonte ma mémoire, je me racontais des histoires dans ma tête, le soir, avant de m’endormir. Mais je me souviens très bien du moment où j’ai décidé d’écrire ma première histoire. J’étais au collège et j’avais 11 ans. Ma professeure de français nous avait dit en début d’année que si des élèves de la classe voulaient écrire un roman, elle le lirait avec plaisir. Ça a fait tilt : mais oui, évidemment que je voulais écrire un roman ! J’ai donc passé une bonne partie de l’année scolaire à noircir un cahier entier, de la première à la dernière page, avec l’histoire d’un couple de tourterelles. Le cahier a fini à la poubelle quelques mois plus tard, et je ne me souviens plus du contenu exact de ce premier « roman », pas davantage que des détails du retour que m’en a fait ma professeure – qui a tenu parole et l’a vraiment lu ! –, mais je sais en tout cas que c’est l’unique encouragement à écrire que j’ai reçu jusqu’à atteindre l’âge de 45 ans. Raison sûrement pour laquelle je ne me suis lancée sérieusement dans l’aventure que si tard. Quel est ton rythme d’écriture ? Hum… Anarchique ? Je n’ai aucune régularité, parce que c’est compliqué de jongler entre vie de famille, vie professionnelle, bénévolat dans diverses associations, répétitions d’orchestre et obligations rébarbatives du quotidien. Alors je vole des heures d’écriture quand je peux, le plus souvent en soirée, quand mes enfants sont couchés ou pas loin de l’être, et les corvées terminées. Comment construis-tu ton travail ? Ah bon, il faut le construire ? Oups ! Blague à part, pour tenter de répondre avec un peu de sérieux à la question : pour les nouvelles, le genre veut que l’intrigue soit très resserrée, donc je n’éprouve pas le besoin de construire quoi que ce soit, je me contente d’écrire le récit comme il vient. Pour les romans, c’est moins évident. Je me suis essayée fin 2022 à préparer un plan en vue d’écrire une dystopie dont j’ai juste les grandes lignes et quelques esquisses de personnages en tête. J’y ai passé de longs mois… En vain : je ne suis jamais parvenue à pondre un plan complet satisfaisant. J’ai juste réussi à me bloquer complètement sur l’écriture de cette histoire. Alors ma tentative de roman suivante, je l’ai entreprise avec une méthode révolutionnaire. Attention, tenez-vous bien, je vous révèle la méthode en question : « pas de plan » ! Or, il se trouve que j’ai démarré puis achevé l’écriture de ce roman sans problème. Donc en toute franchise, je dirais qu’au stade où j’en suis, je ne suis pas capable de construire : je lance mes personnages dans l’arène et je les regarde écrire eux-mêmes leur histoire. Je me contente seulement de la transcrire. Et ce n’est que quand j’ai un premier jet complet que j’arrive à me poser pour m’interroger sur l’articulation des grandes étapes de l’intrigue, et que je prends le temps de réagencer les briques, de les polir, d’en ajouter certaines, d’en supprimer d’autres, jusqu’à ce que l’ensemble finisse par ressembler à quelque chose et soit présentable en bêta-lecture. Plutôt nouvelle ou roman ? Les deux ! J’aime les nouvelles parce que, il faut bien l’avouer, c’est quand même super satisfaisant de pouvoir poser le mot « FIN » sur une histoire sans avoir à y travailler pendant plusieurs mois, voire années. Et j’aime les romans parce que je prends beaucoup de plaisir à côtoyer certains de mes personnages sur le long terme. Pourquoi être indépendante ? Instant confession : je ne suis pas indépendante. Au mieux, je suis hybride. J’ai autoédité une